Je tuerai la pianiste
Ah transe fracassante, frénésie qui tout d'un coup survient.
Elle se sent aux omoplates, aux poignets, tout l'être dit :
ECRIT !
Et j'obéis sinon je me sens amère comme jamais. C'est impossible de resister de toute façon. Ces moments là sont magnifiques. Je ne sais pas de quoi je parlerais dans la prochaine ligne. C'est presque trop beau pour un seul être, cette énergie qui se dévaste devrait être partagée. Mais comme se transmet elle ?
Est elle éléctrique ? Est elle une substance, quelque chose de spirituel, de l'ordre de la banale bondieuserie ? Biensur que non, ah oh mais quoi alors ?
Il y a forcément un choc dans le corps qui se produit lorsque l'inspiration vient puisque tout dedans le ressent ; comme quand je me mets à dessiner. Je n'ai pas envie de vulgaires explications, enfin de raisonnement scientifique.
C'est autre chose qu'il faut chercher : ça se prononce discrètement dans la continuité de la pensée, de la main, de l'encre et du papier ; ça s'annonce si délicieusement dans les muscles !
Alléluia ils diraient !
Voilà que tout s'atténue un peu. Peut être est ce une feinte. Souvent ça revient très vite et j'écris d'autres pages. Je sais que c'est dans la concentration, dans la posture, l'intensité, mais c'est plus encore, car on peut avoir tous ces symptômes et ne rien dire.
Oh ! J'en parle comme d'une folle maladie. Béni soit le jour où je l'ai attrapé, ah religion va t'en de mes mots, le païen seul permet des yeux neufs sur les Mondes. On les connait, mais on n'y voyage pas encore, c'est sale cette attente qui pourrit et s'étend dans ma poitrine, qui s'insinue dans les organes et le miel bleu des mots.
Faites moi passer ce goût insupportable, j'avalerai n'importe laquelle de vos liqueurs tant qu'elle me lavera et plongera l'ancestrale immobilité des saveurs dans le mouvement !
Quel épuisement !
En voilà des instants ! Rares et précieux, et rouges comme un nouvel or.